Père commercial, mère ophtalmologiste. Une grande soeur, une petite sœur. Naissance à Versailles, enfance et jeunesse en région lyonnaise (côté Beaujolais). « J’ai reçu une éducation ‘classique’. » Ecole de commerce à Lyon. « Pourquoi une école de commerce ? C’est une formation généraliste, surtout quand on a suivi une honnête scolarité… sans être l’élève la plus studieuse du monde. Et puis j’avais de la ‘tchatche’ » - elle en a toujours. A croire que Pauline Weinmann savait qu’il s’agissait là d’un simple marchepied pour mieux inventer sa vie, plus tard et ailleurs. Une vie qui commence à Paris par « des sauts de puce dans différents milieux commerciaux ». Chargée de clientèle chez Konica Minolta, par exemple (« Une bonne école de vente, pour débuter. Le porte-à-porte, c’est très formateur… »), ou encore négociatrice commerciale dans l’immobilier (« Il y a un côté très humain, on entre vite dans l’âme des gens. J’étais trop sensible. »). Mais rien qui la passionne franchement (« Dans les jobs commerciaux on s’ennuie vite. »). Elle s’offre un break théâtral avec deux années au Cours Florent. « J’en avais toujours eu envie ! J’aime la scène. Je me suis dit que cela pouvait me servir plus tard, en termes de positionnement corporel, de prise de parole. J’ai appris plein de choses. » Pour payer ses cours, elle fait un peu de mannequinat en posant pour des photos publicitaires. Pauline Weinmann ou ‘mens sana in corpore sano’… Pauline Weinmann ou une jeune femme à la recherche d’elle-même…
De « Poétique Paris » à Sarzeau
« J’ai toujours pensé à l’entrepreneuriat, et j’ai toujours eu envie de créer ma propre entreprise. » Voilà qui est dit. Entreprendre, certes, mais dans quel domaine ? « Il me fallait le temps de réfléchir, de trouver le bon projet, au bon moment. » L’occasion de mettre un pied dans le monde de l’entreprise se présente en 2016 lorsqu’avec une collègue et amie, en cohérence avec son goût prononcé pour l’idée de plus en plus prégnante d’une mode responsable, elle crée Poétique_Paris, site de vente en ligne de vêtements en cuir. Ou plus exactement d’alter cuir, dans une double mouvance écologique et vegan, sans cuir animal et à base de matières alternatives végétales. Le caractère écologique en reste néanmoins discutable dans la mesure où ce cuir de fruits ou de céréales contient des matières synthétiques à base de plastique pétrosourcé, ce dont Pauline est consciente. « Nous étions aux prémices de ce marché encore peu développé. C’était sans doute un peu tôt, et sans doute une erreur d’entrepreneuriat. » A quoi s’est ajoutée bientôt l’incertitude des temps, Covid et Gilets jaunes, du genre Paris sans poétique. Fin des débuts. « Je commençais déjà à penser à la suite. J’avais ciblé ce que j’avais envie de faire. »
Période complexe de sa vie durant laquelle Pauline trouve refuge près de chez ses parents, à Sarzeau, Morbihan, Bretagne. Sarzeau et ses presque 9 000 âmes, au cœur de la presqu’île de Rhyus, le golfe du Morbihan au nord, l’océan Atlantique au sud, son château de Suscinio, ses plages de sable fin et ses couchers de soleil… « Le choc ! J’adore la Bretagne… en vacances, mais ma vie est à Paris. » Pauline connaît des heures difficiles - mais quel entrepreneur prétendra que l’entreprise est un long fleuve tranquille, même au bord de la mer ? Retour à Paris.
100 % de résultat
Comme souvent, tout est affaire de rencontre. Celle, par exemple, de Sylvain Lisembard, directeur général d’AgroParisTech Innovation, qui la met en relation avec Kévin Magnin, directeur adjoint d’un laboratoire au Centre Européen de Biotechnologie et de Bioéconomie de Pomacle, près de Reims.
Pauline explique son idée d’un substitut au cuir et aux textiles enduits, 100 % biosourcé (issu de co-produits agricoles de blé et d’amidon de maïs), 100 % recyclable, personnalisable (grain, couleur…), et made in France. Simple. Il faudra quand même une paire d’années pour aboutir à une biorésine à mémoire de forme, dûment brevetée, correspondant non seulement à ce que souhaitait Pauline mais encore aux besoins du marché, et qui se régénère à l’infini, en parfaite adéquation avec le principe d’économie circulaire. Alternative Innovation est née (2020), et s’adresse aujourd’hui aux filières de luxe de la maroquinerie, sellerie, automobile, ameublement…
Travail, passion et résilience
L’histoire de Pauline Weinmann et d’Alternative Innovation est assez représentative du cheminement entre l’envie (devenir entrepreneur) et la réalité (créer son entreprise). C’est-à-dire que cela ne se fait pas en claquant des doigts. « Devenir entrepreneur, c’est un métier ! Il faut avoir conscience des sacrifices que cela implique. » Sous-entendu, il ne faut pas s’arrêter à la première difficulté mais savoir rebondir « et faire preuve de résilience ». D’humilité, aussi. « L’indépendance du chef d’entreprise est très relative. Il est surtout l’élément d’une chaîne. Ce n’est pas lui seul qui fait la force de son entreprise, mais son réseau, ses recrutements, la façon dont il s’entoure. Bien sûr, in fine, il doit décider, trancher. Et puis il lui faut ‘séduire’, ‘accrocher’ ses interlocuteurs, savoir leur vendre son projet. » D’où l’intérêt d’avoir suivi quelques cours de théâtre dans sa jeunesse, n’est-ce pas ? Tout cela est aussi affaire d’expérience. Et l’expérience, elle se trouve : « Je suis en train de constituer un board, avec des gens qui me connaissent, spécialistes du secteur du luxe, du juridique, des finances… » Avec Alternative Innovation, qui prend son essor, Pauline Weinmann démontre que « tout est possible avec travail, passion et résilience ». D’ailleurs, elle en a fait sa devise.
